© Henri Pornon

Dans cet ouvrage publié en anglais (PENNICK, Nigel & DEVEREUX, Paul, Lines on the landscape : leys and another linear enigmas, 1989, Robert Hale, Londres), 

les deux auteurs examinent de façon très détaillée le cas des leys et autres alignements identifiés à la surface de la terre. Une partie de ces alignements proviennent de la période préhistorique et bon nombre d'entre eux sont encore matérialisés par des mégalithes, joignent entre eux des cercles de pierre mégalithiques, ou sont encore identifiables sur le terrain ou sur des photographies aériennes. Parfois, des chapelles ou des églises construites sur d'anciens mégalithes se sont insérées dans ces lignes droites. Ils s'interrogent sur les fonctions de ces lignes droites, qui ne constituent pas toujours l'itinéraire le plus pratique pour aller du point de départ à l'arrivée. La présence d'allées couvertes, de tumulus et de dolmens, lieux de sépultures, conduit à envisager une fonction rituelle et spirituelle de bon nombre d'entre eux. L'existence de ces leys et leur conception humaine ne fait aucun doute. Les auteurs remarquent la grande précision de ces alignements, compte tenu des distances parcourues et des problèmes de visibilité . 

Les auteurs examinent également d'autres alignements urbains, plus récents, associant des églises (York, Cambridge), des mosquées (Le Caire) ou d'autres lieux sacrés. Ici, la démonstration est moins convaincante comme j’en ai fait l'expérience sur York et Cambridge (voir plus loin), villes dans lesquelles on trouve facilement d'autres alignements similaires à ceux identifiés par les auteurs. Cela semble confirmer le point de vue déjà exprimé que l'alignement de plusieurs lieux peut être le fait du hasard et que l'intérêt d'un tel alignement provient plus de la qualité des sites impliqués (dédicace particulière, construction dans une période de temps réduite) que du nombre de sites alignés. 

Un chapitre très intéressant de cet ouvrage est celui dans lequel les auteurs évoquent l'hypothèse que ces leys puissent être des réseaux d'énergie. Ils montrent comment elle a émergé dans les milieux new age des années 1930, puis après 1970 : Les leys de Watkins, les lignes de force, la radiesthésie et les ovnis sont devenus une sorte de cocktail Molotov conceptuel (expression des auteurs) pendant la décennie psychédélique et restent aujourd'hui associés dans la tête de nombreuses personnes. Les auteurs ne semblent finalement pas souscrire à cette hypothèse.

Après géolocalisation des lieux sacrés de Cambridge, et comparaison de la holy line décrite par Pennick et Devereux (en rouge) et d’autres lignes passant par un grand nombre de lieux sacrés (en noir), plusieurs lignes ont un nombre de points équivalent, mais elles sont toutes plus longues que celle identifiées par les auteurs et si on se limitait au centre historique de Cambridge, aucune n’associe autant de points. A la différence d’York, de nombreux lieux sacrés sont éloignés du centre historique (il y en a 131 au total).

 Peut-on en déduire pour autant qu’une intention humaine est à l’origine de la holy line de Pennick et Devereux ? Je n’en suis pas convaincu. 

Les alignements de Cambridge (cartographie Open Street Map)

Cambridge : nombre de sites à proximité des lignes

NBRE10, 20, 50 : nombre de lieux sacrés à moins de 10, 20 et 50 mètres de la ligne

Voici une carte sur laquelle apparaissent, d’une part, en rouge, la holy line de Pennick et Devereux et d’autres lignes, en violet, qui joignent des lieux de culte de la Ville. Signalons que la majorité des lieux sacrés (46 au total) sont situés dans le centre historique d’York.

La question qu’on peut en effet se poser est de savoir si la holy line décrite par les deux auteurs présente un intérêt particulier dans cette ville. Peut-on affirmer que son intérêt est d’associer un plus grand nombre de lieux sacrés ? L'identification du nombre de lieux sacrés situés respectivement à moins de 10, 20 et 50 mètres de la ligne met en évidence que 3 autres lignes ont un nombre de lieux équivalent à la holy line de Devereux.  Je ne dispose pas d’informations sur l’importance des lieux sacrés situés à proximité de ces diverses lignes, qui permettrait peut-être de qualifier cette ligne par rapport aux autres. La Cathédrale a certainement un statut spécifique, mais que dire des autres lieux sacrés ? En l’absence de telles informations, ma conclusion provisoire est que cette ligne est le fait du hasard. 

Les alignements d'York (cartographie Open Street Map)

York : nombre de sites à proximité des lignes

NBRE10, 20, 50 : nombre de lieux sacrés à moins de 10, 20 et 50 mètres de la ligne